top of page

Les Experts: Boston (critique)

Ce qui distingue un bon, voire un grand film, d’un film mauvais, moyen ou banal, ça se joue pas toujours à grand chose mais c’est toujours perceptible. Ça se joue à des choix de mise en scène intéressants, un montage intelligent, une narration originale, bref une patte, un style, quelque chose. C’est comme en littérature d’ailleurs, vous aurez beau raconter la meilleure histoire du monde, si vous vous contentez de faire de la description pure et dure, sans aucun style, bah le bouquin sera nul. Salut, ça faisait longtemps qu’on s’était pas vu.


Mystic River - réalisé par Clint EASTWOOD - sorti en France le 8 octobre 2003



Alors, le film commence à Boston avec trois enfants, Jimmy, Dave et Machin (désolé je me souviens plus de son nom, mais le mec qui finit à la crim’ et qui est joué par Kevin Bacon), qui jouent au hockey sur la route comme tous les enfants américains de tous les films américains, et l’un d’entre eux, Dave, est kidnappé par un mec bizarre qui va certainement le battre/violer/torturer/on sait pas trop encore, pendant quelques jours. Le reste du film se déroule quand les trois enfants sont devenus adultes, et nous invite à suivre les répercussions sur chacun d’entre eux du meurtre sauvage de la fille de Jimmy, Katie. Alors… Est-ce que le film est mauvais ? Pas vraiment. C’est pas mauvais, mais c’est pas spécialement bon non plus. Disons que le scénario, sans être particulièrement mauvais, est suffisamment banal pour que ce soit à la réalisation que tout doive se jouer. Et ici c'est pas de bol, parce que niveau réalisation, ça pêche quand même pas mal...


Et c’est con parce que c’est tout le temps des petits détails de rien du tout mais qui empêchent d’entrer totalement dans le film, des petits trucs inutiles qu’il aurait tout simplement fallu virer. Le fait que le centre d’attention soit porté dès le début sur les deux viocs qui discutent sur leur balcon par exemple. Ces deux vieux-là, on ne les reverra jamais, ils n’ont aucune importance, le film aurait tout aussi bien pu gagner du temps et commencer sur un des trois enfants juste avant la partie de hockey. Le mini flashback de Dave au moment de passer à l’endroit où il s’est fait enlever gamin, qui relève clairement de l’assistanat, comme si on était trop con pour pouvoir y penser nous-même, malgré le regard sur-dramatique de Tim Robbins. C’est superflu, ça tire sur la corde, c’est pas bien. Mais bon, le film peut encore largement se rattraper, mais au lieu de ça, il va préférer renouveler en permanence sa première erreur. Sean, putain ! C’est Sean qu’il s’appelle, le troisième gamin. Je vais l’appeler Machean, du coup. Pardon, je poursuis.


Le centre d’attention change en permanence, mais d’une manière un peu dérangeante. D’habitude ce changement se fait après une scène de tension, un cliffhanger, quelque chose. Là non. On change, c’est tout, et ça semble complètement aléatoire, ce qui a pour conséquence de perdre du temps à nous introduire à une situation pas forcément intéressante et de façon assez laborieuse à chaque moment où on pourrait aller plus en profondeur dans le passé, l’esprit, l’évolution du personnage qu’on suivait jusque là. Le seul personnage dont on apprendra finalement un petit quelque chose de plus est Dave, et il faudra attendre près de deux heures pour ça. Tous les autres personnages stagnent et finissent exactement comme ils ont commencé. Et pour combler le tout, un changement d’attention particulier va finalement faire se concentrer l’intrigue sur une enquête policière classique menée par Machean, tout en distillant ça et là des scènes où on voit Sean Penn (Jimmy) qui pleure, parce que c’est bien connu, montrer un personnage qui pleure, c’est émouvant, bah oui.



On pourrait aussi souligner le fait que la plupart des révélations arrivent de façon presque divine, comme si le scénariste n’avait aucune idée de comment les amener autrement. Genre « Katie allait partir pour Las Vegas, on le sait parce qu’on a trouvé des trucs ». Ah ? Bon bah d’accord… Et ça pose un problème, non seulement parce qu’aucune découverte qui pourrait donner lieu à une scène qui force notre attention ne nous est montrée, et ensuite parce qu’on a l’impression que le film se fout complètement des spectateurs, comme s’il était destiné à être vu par des gens qui ont déjà lu le scénar. Et puis y’a deux, trois autres conneries, comme la mère de Brandon (j’ai pas parlé de lui, c’est le copain de Katie, la fille de Jimmy), qui visiblement déteste son fils au point d’insinuer gratuitement devant la police qu’il pourrait peut-être être un meurtrier… Une jolie métaphore à la merde avec des vampires, un peu comme de la philosophie de comptoir, mais sans la philosophie, bref...


Et pourtant, comme je disais, le film n’est pas purement mauvais, ça se suit assez facilement malgré les erreurs, mais il reste un point qui fait très mal, surtout venant de Clint Eastwood: on touche, que dis-je "on touche", on se prend dans la gueule le degré zéro de la mise en scène. Y’a rien. Aucune idée, aucune tentative, rien, à tel point que j'ai moins l'impression d'avoir vu un film qu'un épisode trop long d’une série policière quelconque. Ce film transpire la banalité par tous ses pores, que ce soit dans sa réalisation, ses thématiques, son esthétique, son ambiance, ça dégouline littéralement de partout. Comme si le classicisme ne suffisait plus et qu’il fallait pousser le bordel encore plus loin… La seule chose qui peut nous convaincre que c’est bien du cinéma, c’est les têtes connues du casting. D’ailleurs, histoire de finir sur une note positive, le casting fait le job, personne n’est mauvais, rien à redire là-dessus. Mais quand même… Je trouve très bizarre que ce film soit l’un des plus appréciés de Clint Eastwood… Ceci dit c’est pas non plus une purge absolue comme American Sniper



 ceci est un message de captain prozac 

 

Salut, c'est Prozac, le mec derrière le site. Juste pour dire qu'il faut éviter de prendre tout ce que je dis au pied de la lettre et me considérer comme le Grand Gardien de la Vérité, de la Morale et du Bon Goût (même si c'est bien le genre de truc que j'aime dire). 

Voilà. Éclate-toi, et va voir des films.
 

Bisous.

 sorties à surveiller: 

 

17/06:  Swiss Army Man de Daniel SCHEINERT & Dan KWAN

10/08: Parasol de Valéry ROSIER

05/10: Mademoiselle de Park CHAN-WOOK

 articles récents 
bottom of page